Un si fragile vernis d'humanité – Banalité du mal, banalité du bien : Différence entre versions

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('''*''') : [http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=15761 Francis Hutcheson, Essai sur la nature et la conduite des passions et affections avec illustrations sur le sens moral. (1728)]<br>
 
('''*''') : [http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=15761 Francis Hutcheson, Essai sur la nature et la conduite des passions et affections avec illustrations sur le sens moral. (1728)]<br>
 
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Les motivations désintéressées sont, dans certains actes, d'une clarté telle qu'aucun soupçon sur leur nature véritable n'est possible : "Notre sens moral nous détermine à approuver ces dispositions aimables là où nous les avons ''le plus distinctement observées'', et notre bienveillance nous fait prendre part à l'intérêt de ceux qui les possèdent"('''*''').<br>
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Le sens moral doit donc être compris, au double sens de la ''disposition'' naturelle envers la bienfaisance, laquelle nous attache au bonheur des autres ou au bien public indépendamment de tout intérêt propre, et de la ''faculté de juger'', d'approuver ou de condamner les actions humaines dont les intentions se donnent souvent, quoique pas toujours, avec une évidence en laquelle on peut avoir une pleine et entière confiance (en particulier dans les cas d'égoïsme ou, à l'inverse, d'altruisme ''manifestes'').<br>
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Ce n'est pas que cette confiance soit naïve, qu'elle ne puisse être trompée ou que l'on ne soit pas parfois confronté à des incertitudes sur la part d'amour-propre et de bienveillance qui se mêlent dans les intentions de la volonté ; mais sans cette confiance ''originaire'' dans ce qui se donne à voir, dans la vertu révélatrice du paraître, il n'y aurait même pas possibilité de douter ou de procéder à un examen critique des mobiles, égoïstes ou désintéressés, du sujet. Et il en est ainsi parce que, dans la vie quotidienne, la confiance l'emporte généralement, chez la plupart d'entre nous, sur la méfiance. Non point qu'elle ne puisse être déçue ou trompée, mais précisément la tromperie et la déception qui en résulte présupposent que la confiance soit le mode premier, le mode originaire, par lequel nous nous rapportons aux autres et au monde.
  
 
(''D'autres extraits d'importance, transcription en cours... '')
 
(''D'autres extraits d'importance, transcription en cours... '')

Version du 5 février 2016 à 18:27

Titre : Un si fragile vernis d'humanité – Banalité du mal, banalité du bien
Auteur(s) : Michel Terestchenko
Résumé Court : Un si fragile vernis d'humanité - couverture du livre.png

Extrait - pages 17 et 18 – Introduction :
"L'altruisme n'exige pas la déprise, l'anéantissement, la dépossession de soi, le désintéressement sacrificiel qui s'abandonne à une altérité radicale (Dieu, la loi morale ou autrui). L'abandon, la déprise de soi, est au contraire l'un des chemins qui mènent le plus sûrement l'individu à la soumission, à l'obéissance aveugle et à la servilité. Seul celui qui s'estime et s'assume pleinement comme un soi autonome peut résister aux ordres et à l'autorité établie, prendre sur lui le poids de la douleur et de la détresse d'autrui et, lorsque les circonstances l'exigent, assumer les périls parfois mortels que ses engagements les plus « intimement » impérieux lui font courir.

A la définition de l'altruisme comme désintéressement sacrificiel qui exige l'oubli, l'abnégation de soi en faveur d'autrui – définition que la tradition morale et religieuse a presque unanimement consacrée -, les résultats des recherches entreprises sur ce sujet nous invite à substituer à celle-ci : l'altruisme comme relation bienveillante envers autrui qui résulte de la présence à soi, de la « fidélité à soi », de l'obligation, éprouvée au plus intime de soi, d'accorder ses actes avec ses convictions (philosophiques, éthiques ou religieuses) en même temps qu'avec ses sentiments (d'empathie ou de compassion), parfois même, plus simplement encore, d'agir en accord avec l'image de soi indépendamment de tout regard ou jugement d'autrui, de tout désir social de reconnaissance. L'altruisme comme relation cohérente entre les formes de sympathie éprouvées et les principes éthiques, parfois religieux, de l'obligation de secours, une cohérence qui se traduit par des actes effectifs (et allant bien au-delà de la simple intention), comme respect de soi reposant sur cette cohérence maintenue par l'image de soi, tels sont les aspects principaux de la nouvelle définition que nous voudrions avancer.

Si l'altruisme n'exige pas de chacun le sacrifice de soi, de ses désirs les plus profonds, y compris le désir du bonheur – sacrifice que réclament toujours les institutions aliénantes -, c'est qu'il conduit à « l'épanouissement » de soi, entendu comme accomplissement de l'une des plus hautes capacités de l'être humain : la capacité de prendre sur soi la souffrance d'autrui. Seul un être pleinement accordé à soi peut assumer pareil risque. Et dans ce risque assumé qui accepte l'éventualité que soit mis en péril « la préservation de soi », c'est à dire sa propre existence, se fraye la voie d'une plus essentielle « réalisation de soi », en sorte que le risque altruiste, quoiqu'il doive parfois affronter jusqu'à la possibilité de la mort, n'a en réalité rien de sacrificiel.

La souveraineté du paradigme de l'égoïsme psychologique doit donc être radicalement remise en cause d'une part, au motif qu'il est incapable de rendre compte des conduites humaines de destructivité, d'autre part, parce qu'il produit comme son double inversé une définition de l'altruisme qui conduit à nier qu'existent des motivations proprement altruistes (qui se ramènent, en dernier ressort, à des intentions secrètement intéressées).

A ce paradigme, je propose de substituer, à titre d'hypothèse directrice, celui qui oppose « l'absence à soi » à « la présence à soi ». Absence à soi d'une individualité défaillante, inconsistante, prête à succomber à toutes les formes de domination, d'asservissement et de passivité, mais non pas nécessairement dénuée de tout « sens moral » ; présence à soi, au contraire, d'un être doté d'une puissante ossature intellectuelle, spirituelle, morale, comme on voudra, d'un « équilibre intérieur » - j'emprunte l'expression à Nadejda Mandelstam – qui le rend capable de résister à l'oppression, à l'injustice, aux aliénations de l'idéologie dominante, capable de voir l'inacceptable, de discerner le mal comme tel et d'agir en conséquence. Capable en somme de se dresser contre l'ordre établi du monde et de se poser comme une conscience libre et bienveillante."

Voir aussi : Article du 15 mars 2014 - Contrepoints Par Johan Rivalland

Difficulté (de lecture) : Aisée
Pages liées : Spécial:Pages_liées/Un si fragile vernis d'humanité – Banalité du mal, banalité du bien

EXTRAITS :

  • Chapitre 2 : Et pourtant le sens moral existe bien - L'Apparence de la vertu -

La possibilité de l'approbation morale, et donc du jugement moral, résulte de la confiance que l'on peut accorder à la phénoménalité de l'intention, en laquelle s'accordent l'être et le paraître, les mobiles de l'action désintéressée se révélant au grand jour dans certaines actions manifestement altruistes, balayant d'avance tout soupçon. Il appartient à la vertu de se donner et de s'exposer dans son évidence aux regards de tous. Inversement, "les actions qui sont, en fait, excessivement utiles, apparaîtront dépourvues de beauté morale si nous savons qu'elles ne procèdent d'aucune intention bienfaisante envers autrui"(*). c'est le mobile de la volonté, égoïste ou non, qui définit le caractère moral ou immoral de l'intention, mais ce mobile, loin d'être inconnaissable, caché dans le secret du cœur, est au contraire pleinement perceptible dans l'action bonne ou mauvaise. Le paraître de la vertu n'en fait donc pas une apparence trompeuse.
(*) : Francis Hutcheson, Essai sur la nature et la conduite des passions et affections avec illustrations sur le sens moral. (1728)
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Les motivations désintéressées sont, dans certains actes, d'une clarté telle qu'aucun soupçon sur leur nature véritable n'est possible : "Notre sens moral nous détermine à approuver ces dispositions aimables là où nous les avons le plus distinctement observées, et notre bienveillance nous fait prendre part à l'intérêt de ceux qui les possèdent"(*).
Le sens moral doit donc être compris, au double sens de la disposition naturelle envers la bienfaisance, laquelle nous attache au bonheur des autres ou au bien public indépendamment de tout intérêt propre, et de la faculté de juger, d'approuver ou de condamner les actions humaines dont les intentions se donnent souvent, quoique pas toujours, avec une évidence en laquelle on peut avoir une pleine et entière confiance (en particulier dans les cas d'égoïsme ou, à l'inverse, d'altruisme manifestes).
Ce n'est pas que cette confiance soit naïve, qu'elle ne puisse être trompée ou que l'on ne soit pas parfois confronté à des incertitudes sur la part d'amour-propre et de bienveillance qui se mêlent dans les intentions de la volonté ; mais sans cette confiance originaire dans ce qui se donne à voir, dans la vertu révélatrice du paraître, il n'y aurait même pas possibilité de douter ou de procéder à un examen critique des mobiles, égoïstes ou désintéressés, du sujet. Et il en est ainsi parce que, dans la vie quotidienne, la confiance l'emporte généralement, chez la plupart d'entre nous, sur la méfiance. Non point qu'elle ne puisse être déçue ou trompée, mais précisément la tromperie et la déception qui en résulte présupposent que la confiance soit le mode premier, le mode originaire, par lequel nous nous rapportons aux autres et au monde.

(D'autres extraits d'importance, transcription en cours... )

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