"L'école à la maison en question" - compte-rendu

Origine : Page FB événement "L'école à la maison en question"
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• Cycle de débats/rencontres sur "l'éducation en train de se faire" proposé par Les PetitsDébrouillards Grand Est et Réseau Recit Lorraine

• Avec la participation de:

- Fred Parisse, Aire Accueil des Gens du Voyage, Mairie Maxeville

- Marion Cremona, Colibris 54 - Nancy

- Renaud Minuel, Afev Nancy

• Lieu de la rencontre : Espace Edgar P Jacob, 33 rue des brasseries, 54320 Maxéville.
• Date de la rencontre : dimanche 14 décembre 2014.
• Durée de la rencontre : 14H - 17H

1 L'école à la Maison : où en est-on, quelle réalité, quel discours sur cette réalité ?

1.1 Les gens du voyage

• Fred Parisse travaille au Pôle Action Sociale à la mairie de Maxéville et s'occupe particulièrement de l'Aire d'Accueil des gens du voyage. Il est attaché à l'intégration des gens du voyage et au lien entre les habitants.
  

1.1.1 Constat : : peu de scolarité, peu d'instruction - des difficultés, des problèmes de comportement et un déficit qui se creuse pour les enfants

Son constat est qu'il y a des difficultés propres aux enfants qui n'ont pas accès à la scolarité et des dégâts produits par l'absence de la scolarité ; ainsi les enfants ont du mal à jouer, s'exprimer, prendre confiance, partager avec les autres, créer des centres d’intérêt. Ils ont aussi des problèmes de comportement : difficulté d'attention ou à se concentrer au sein d'un groupe, difficulté à travailler avec les autres.

• Si la scolarité est obligatoire dès 6 ans, après le CM2 il n'y a plus d'obligation de scolarisation mais reste l'obligation de l'instruction et donc la possibilité de cours par correspondance (afin de ne pas perdre les prestations familiales).
• Le problème chez les gens du voyage est que les enfants ne reçoivent pas d'aide des parents car les parents bien souvent ne sont pas allés eux-mêmes à l'école et ne transmettent pas, que les pères travaillent et que les mères ne travaillant pas ne sont pas instruites et ne savent pas non plus imposer les contraintes et la constance nécessaires à un rythme scolaire. Les déficits se creusent donc. Bien souvent après le CM2 l'instruction s'arrête.
• Chez les gens du voyage il y a la notion de l' "enfant roi" et la peur de l'école. Pour eux l'école est un danger, un lieu de danger (violence) et l'aire d'accueil constitue la sécurité.
• Remarque :

Il peut aussi y avoir la peur de la perte de la culture propre aux gens du voyage, l'école apportant d'autres notions culturelles.

Les gens du voyage vivent en famille et ne conçoivent pas que les enfants s'éparpillent ou s'éloignent.

Il y a souvent un conflit de loyauté entre la scolarisation et l’assiduité. Il faut aussi préciser que les cours par correspondances permettent de garder les prestations familiales et aussi qu'il est fréquent que ce ne soient pas les enfants en cours d'instruction qui remplissent les devoirs de contrôle de ces cours par correspondance.

1.1.2 Propositions d'aide : camions passerelles et soutien au sein de collèges

• Il y a la mise en place de camions passerelles qui sensibilisent à l'école et dont le but est de générer l'envie de mettre l'enfant à l'école.
• Il y a aussi l'école itinérante pour les Tzigane.
• Une autre prise en charge est celle faite par des collèges qui accueillent pour un soutien aux devoirs à raison d'une à deux heures par semaines.

1.2 l'Afev : Association de la fondation étudiante pour la ville

1.2.1 Présentation de l'Afev - des étudiants bénévoles font de l'accompagnement à domicile dans les quartiers populaires

• L’Afev est une plateforme d’engagement solidaire au service des quartiers populaires. L’Afev mène, depuis sa création en 1991, une action d’accompagnement individuel de jeunes dans les quartiers populaires. Cet accompagnement repose sur un principe simple, deux heures par semaine, tout au long de l’année scolaire, un étudiant bénévole intervient auprès d’un enfant ou d’un jeune (de 5 à 18 ans) rencontrant des difficultés dans son parcours. De l’accompagnement vers la lecture (autour de lecture de livre et de visite à bibliothèque) à l’accompagnement vers l’orientation, (autour de la connaissance des filières professionnelles et des possibilités de poursuite d’étude), chaque accompagnant s’adapte à la réalité de l’enfant. Cette action, grâce au lien humain et solidaire qu’il crée, contribue à aider, redonner confiance et offrir une ouverture culturelle à des milliers d’enfants et des jeunes.

1.2.2 Action et apport : aide aux devoirs mais aussi apprentissages différents, enrichissement pour tous (enfant-étudiant), socialisation

• Il y a constitution d'un binôme : étudiant - enfant.
• Cette aide à l'éducation et à la scolarité à la maison permet une meilleure socialisation.
• Cela aussi de changer les représentations des étudiants sur le monde des quartiers et inversement de changer le regard des enfants sur le monde étudiant.
• Le but n'est pas seulement l'aide aux devoirs mais aussi d'apporter des apprentissages différents par le jeu ou la lecture notamment.
• L'apport est un enrichissement pour tous, tout en faisant aussi le lien avec le collège.

1.3 L'instruction non scolaire

1.3.1 Diverses raisons impliquant le choix de déscolarisation

- Pour 32 % des personnes déscolarisant leurs enfants cela est un choix éducatif fait depuis que les enfants sont tous petits.
- Certains sortent de la scolarisation suite à des difficultés à l'école, aussi pour des faits de violence ou des difficultés personnelles de l'enfant.
- D'autres choisissent l'instruction non scolaire suite à une non adaptation de l'enfant ayant de grandes facilités d'apprentissage.
- Stigmatisation des enfants qui n'entrent pas dans le moule scolaire (élève doué ou au contraire en difficulté).
- Les écoles offrant une pédagogie alternative n'ont pas une offre suffisante.

1.3.2 Témoignage de Marion : respect du rythme évolutif naturel, mise en confiance, appui sur le désir et l'envie d'apprendre de l'enfant - pas dévaluation

• Marion a sorti sa fille de l'école suite à une remise en question de la pédagogie dominante de l’Éducation Nationale et aussi parce que sa fille avait des phobies scolaires (maux de ventre, stress).
• Marion ne passe pas non plus par les cours par correspondance car ceux-ci impliquent le même schéma d'apprentissage que l'apprentissage scolaire et ce schéma d'apprentissage scolaire n'est pas respectueux du rythme évolutif de son enfant.
• Marion préfère respecter le rythme naturel de ses enfants ainsi que les besoins de leurs corps. Aussi n'exige-t-elle pas une contrainte de réveil.
• Elle préfère suivre le désir de l'enfant et suivre son envie naturelle d'apprendre en lui apportant tous les outils formels d'apprentissages correspondants à ce désir. Elle opte pour une mise en confiance et ne fait aucune évaluation ni des connaissances ni de la progression. L'enfant suit son rythme évolutif naturel.
• Quant aux outils informels d'apprentissage ils sont aussi apportés par les liens tissés au sein d'activités ludiques ou sportives extérieures ou encore avec d'autres "non-sco", soient d'autres enfants non-scolarisés.

1.4 Que dit la loi

• En France, l'instruction est obligatoire entre 6 ans et 16 ans.
• La déscolarisation est possible à tout moment.
• Il n'y a aucune obligation de pédagogie quand on fait le choix d'instruire chez soi ses propres enfants (cours par correspondances, pédagogies alternatives, apprentissage autonome).

• L'instruction étant une obligation, il est néanmoins possible d'instruire chez soi ses propres enfants ; en ce cas la loi (voir : les Textes de loi du site "Les enfants d'abord") impose depuis 1998 :

- Perte des prestations familiales sans justificatifs d’État ou médical,

- un contrôle social effectué par la commune de résidence tous les 2 ans et dans les 2 mois de la déclaration,

- Une inspection académique annuelle vérifiant que l'enfant a l'environnement nécessaire à son instruction. Il n'y a normalement pas d'évaluation ni de test de connaissance,

- Obligation d'annoncer à l'inspection et à la mairie académique dans les 7 jours de la rentrée scolaire que l'enfant aura une instruction à la maison.

1.5 Discussion Famille / École

1.5.1 Rôle de la famille

• Au delà du moment scolaire il y a une éducation familiale qui doit ouvrir à l'esprit critique.
• Il y a souvent un désintérêt des parents qui laissent à l'école le soin d'éduquer et qui font une confiance totale à l'école

1.5.2 Critiques ou problèmes de l'école

• L'école est assez normative.
• Il y a une opacité de l'école avec une difficulté des parents d'avoir un regard sur ce qui se passe au sein de l'école.
• L'école est souvent le lieu de violence, de jugement, de dévalorisation et de culpabilisation de l'enfant. On crée les adultes de demain et on engendre un cercle vicieux si on place un enfant dans un milieu de violence.
• Il y a un nivellement au sein de l'école et pas d'écoute individuelle.
• L'école ne respecte pas les rythmes biologiques de l'enfant.
• Maria Montessori explique qu'il est important de laisser se développer l'enfant à son rythme et en confiance, que l'enfant se développe guidé par le plaisir et qu'il est apte naturellement à l'attention et à la concentration pour peu qu'on ne le pervertisse pas. La méthode scolaire classique ne prend pas assez cela en compte.

1.5.3 Ce que l'école devrait offrir

• Un environnement de bienveillance et rassurant pour les apprentissages.
• La sécurité.
• Le plaisir d'apprendre. Le plaisir c'est le creuset de l'instruction, il devrait se trouver chez les personnes éducatrices, aussi au sein de la méthode d'apprentissage et pour l'enfant.

1.5.4 Réponses à la critique de l'école

• Reprocher la violence, etc. les différentes choses reprochées à l'école sont des reproches à juste titre mais ce n'est pas l'apanage de l'école : la violence, le hiérarchie dans les groupes, la mise à l'écart sont partout. L'école n'a pas de spécificité là-dessus mais même essaie de contrôler cela.
• Les dysfonctionnements sont partout et viennent souvent des adultes.
• L'école à la maison n'est pas la solution contre la violence car cette violence existe à l'extérieur.

1.6 Discussion sur la Socialisation

1.6.1 Argumentation : l'école est un lieu de socialisation

• Gaston Bachelard, épistémologue à mis en évidence :

- la place du préjugé au prêt à penser,

- que la relation enfant/adulte est déjà une pression et que l'enfant peut être mis en souffrance,

- que l'entrée en société se fait par le groupe,

- que la construction sociale du rapport à l'autre c'est compliqué

Sortir de la scolarisation pourrait donc entraîner un refus de la vie en collectivité.

• L'école est une société qui ouvre à des milieux opposés, grâce à l'école il y a la rencontre de ce qui est différent, parfois même totalement différent. Dans la famille c'est surtout la société des pairs donc un milieu connu et sans nouveauté.
• L'école permet aussi l'acceptation de la frustration ce qui donne des cadres et ouvre à la socialisation.

1.6.2 Contre-argumentation

• La socialisation est en fait plus forte hors milieux scolaire car la socialisation en milieu scolaire ne se fait qu'au sein du monde des enfants.
• L'école apprend souvent la violence et la frustration et non la socialisation.
• A la maison, les rencontres se font entre les familles qui sont aussi "non-sco" et qui diffèrent énormément. Il y a aussi toutes les activités extra-scolaires et les contacts avec les voisins, les gens de l'extérieur qui tous diffèrent les uns des autres. Il y a une grande diversité, plus importante hors de l'école qu'au sein de l'école où tout est plus normalisé.
• 17 % des enfants sortent à 16 ans sans diplôme, 40 % en CM2 ont de grosses difficultés à la lecture, on n'apprend pas à communiquer dans la non violence au sein de l'école, il n'y a pas besoin d'être tant d'années au sein des classes pour se préparer à la non violence au contraire il y a des clans au sein de l'école et la mixité sociale ne fonctionne pas pour faciliter les contacts et la socialisation.
• Un enfant libre n'est pas un enfant sans cadre et donc l'acceptation de la frustration est aussi présente au sein de l'instruction à la maison.

1.7 Thèmes à aborder lors de prochaines réunions/rencontres sur le sujet de l'éducation

• Mixité sociale.
• Travail et famille.
• Problème du regard des adultes.
• Transformer le système.
• Socialisation.
• Intégration de la famille dans l'éducation.
• Place de la famille.
• Inégalités éducatives.
• L'école doit rester un pilier.
• La communication non violente à l'école.

1.8 Petite note personnelle

Excellente réunion, très intéressante et conviviale.
Très bon contact avec chaque participant et organisateur.
Projet retenu que le groupe des Gentils Virus lorrains déjà en lien avec deux associations locales puissent travailler avec nos amis Les Petits Débrouillards Grand Est, Réseau Recit Lorraine et Colibris54 afin de regrouper les énergies et les bonnes volontés,et aussi pour élargir au maximum et aller à la rencontre de la population tous ensemble.