1789-1792 / 1792-1794 les deux Révolutions françaises
Titre : | 1789-1792 / 1792-1794 les deux Révolutions françaises |
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Auteur(s) : | Henri Guillemin |
Résumé Court : | Description de l'ouvrage :
On avait bien compris, à la lecture de son Silence aux pauvres, qu Henri Guillemin ne se contentait pas, quant à la Révolution française de 1789, des versions officielles et convenues. La suite de conférences, données à la Radiotélévision belge en 1967, réunies ici par les soins de Patrick Rödel et Jean-Marie Flémale, nous le confirme. Pour Henri Guillemin, en 1789, on assiste à une révolution des gens de bien, qui doit permettre à la bourgeoisie d affaires d accéder au pouvoir, quitte à le partager avec l aristocratie dans le respect d un certain ordre social. La vraie Révolution, populaire, qui se préoccupe réellement des classes pauvres, du Quart Etat, restait à venir. Elle aura vécu de 1792 à 1794 et sera liquidée avec la mort de Robespierre. C est donc de ces deux Révolutions françaises que traite ici Henri Guillemin, en bousculant singulièrement, une fois de plus, les idées reçues.
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Extrait
CONFÉRENCE 1
Le livre de Daniel Mornet, qui date de 1933, Les origines intellectuelles de la Révolution française, en dépit de la filiation de Mornet avec Michelet et Y Encyclopédie, reconnaît, avec une netteté absolue, que du côté politique, Y Encyclopédie n'a eu aucune influence sur la Révolution française.
Je ne vous ai pas parlé non plus des loges maçonniques. Un spécialiste, M. Bernard Fay, dans La grande Révolution (1959) attribue une importance extraordinaire à la préparation de la Révolution française dans les loges maçonniques. J'en suis moins sûr que lui. Les loges maçonniques, c'est très complexe. Il y avait là des éléments antagonistes : des gens qui étaient des athées, mais qui ne le disaient pas et des gens qui étaient très dévots, comme Louis XVI. Il faut penser que, quand on parle de l'influence de la franc-maçonnerie, elle est réelle, mais s'exerce dans des sens multiples.
Il faut également noter l'influence étrangère. Nous autres français avons un peu trop tendance à considérer que nous avons été les seuls initiateurs de la Révolution, alors que de grands mouvements ont déjà eu lieu en dehors de France.
D'abord, il y avait eu la Révolution anglaise. Une partie de l'intelligentsia française a été, jadis, fascinée par ce qu'on appelle la constitution anglaise - qui n'est d'ailleurs pas une constitution. Les anglomanes disaient : «En France, il faudrait faire quelque chose à l'imitation de l'Angleterre,» c'est-à-dire un roi, deux Chambres, les Communes et la Chambre des Lords - très important, les Lords ! ce n'est pas ça que je veux souligner surtout, mais que, dans les trente dernières années du XVIIIe siècle, on assiste à un très profond frémissement social, dans l'Europe occidentale. Ce frémissement a deux causes. D'abord, la constitution d'une nouvelle classe sociale, d'une répartition différente de la fortune. Et ensuite, deux phénomènes conjugués : une hausse constante des prix et une augmentation démographique considérable. Ce n'est pas que la natalité augmente, mais les gens meurent moins, étant donné qu'il y a moins de famines et qu'il n'y avait pas eu de grandes guerres exterminatrices. Entre 1739 et 1789, la hausse de la population en France a été de 60 % et de 100 % en Angleterre.
Du coup, on assiste à des événements qui ressemblent fort à une révolution. Par exemple, en 1780. Du 2 au 6 juin, le centre de la Cité de Londres est en feu. Au point de départ, des problèmes religieux. Mais très vite, cela devient une affaire sociale : les petites gens des faubourgs, les malheureux qui vivent dans une misère complète, attaquent la Banque d'Angleterre. Vous imaginez bien ce qui s'est alors produit, la bourgeoisie était armée, les miséreux n'ont plus eu qu'à rentrer sous terre.
En 1781, dans les Pays-Bas, a lieu un grand mouvement national de protestation, à la fois politique et social. Il s'intitule «Allez, Patriotes» et si, en France, à partir de 1789, on appelle «patriotes» les révolutionnaires, c'est à l'imitation de ce qui s'était passé dans les Pays-Bas. Cela commence en 81 et prend une tournure violente en 87. Le stadhouder fait appel à des puissances étrangères. Ce sont des troupes anglaises, ce sont des troupes prussiennes qui interviennent pour écraser les révolutionnaires.
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